Lorsque Damien découvre que sa fiancée couche avec son meilleur ami, il décide de préserver leur mariage… pour mieux mettre en scène sa vengeance.
« Juin, quel beau mois pour les mariages ! » s’est écrié la mère de Violaine en apprenant que nous avions décidé de nous marier. « Mon petit Damien », a-t-elle ajouté, « tu es maintenant un fils pour moi. » Violaine et moi nous sommes lancés dans les préparatifs du mariage. Briefés par nos deux mamans qui souhaitaient que la fête soit la plus traditionnelle possible, nous avons relevé haut la main les défis du casting des traiteurs et du choix du lieu.
Nous avons réservé un joli château avec quelques chambres pour les invités privilégiés et, ensemble, nous avons passé en revue chaque détail. Puis, un jour de mai, alors que Violaine prenait sa douche, j’ai vu son téléphone portable s’allumer. Le nom de ma meilleure amie est apparu : Alexis. Je n’ai rien dit, certain qu’Alexis, mon témoin, préparait un discours pour moi et avait besoin de l’aide de Violaine pour l’écrire.
Quand elle a repris son téléphone, en sortant de la douche, elle a légèrement rosé. Pour ne pas l’embarrasser, j’ai détourné le regard. Mais j’ai trouvé étrange qu’elle me dise qu’elle allait faire une course. Une course un samedi ? D’habitude, on faisait ça ensemble.
Mais j’ai mis cette incongruité sur le compte du discours supposé et j’ai continué à feuilleter seul un guide touristique. Il était entendu que la lune de miel était une surprise et que c’était moi qui la réservais pour Violaine. J’ai réservé un hôtel aux Maldives, en pensant à sa prédilection pour l’eau chaude et au cliché de l’île paradisiaque.
LA TRAÎTRE
Violaine s’est absentée pendant un long moment. A son retour, elle s’est précipitée sous la douche. J’ai entendu son téléphone portable vibrer dans la poche de son manteau. Et je suis allé le chercher sans hésiter. Je n’ai pu lire que le début du SMS qu’elle venait de recevoir, la fin étant cachée, un code secret en bloquant l’accès.
Le message était d’Alexis. Les premiers mots étaient : « Reviens, j’ai toujours envie de… » C’est à ce moment-là que j’ai compris qu’ils avaient une histoire. Il aurait pu écrire : « Je veux toujours savoir ce que Damien pense de… » Mais non. J’étais sûr de moi. Alors j’ai crié à Violaine : « Je viens voir mes parents, je suis là dans deux heures ! ». Elle m’a répondu : « Oui, oui ! » Je suis alors allé me cacher dans l’escalier, à l’étage du dessus.
Dix minutes plus tard, elle est sortie en courant. Je l’ai suivie. Alexis habitait à deux rues de chez nous. Violaine a composé le code d’entrée, qu’elle connaissait par coeur. J’ai attendu, puis je suis monté à l’étage. J’ai écouté derrière la porte d’Alexis, avec le dernier espoir que mon amour et mon amie répètent une ode à moi pour le mariage. Depuis l’obscurité du palier, j’entendais Violaine hurler des mots chauds et passionnés. Sous le choc, je suis parti, errant sans but.
Je ne comprenais plus rien, ma vision était brouillée. Mais j’ai décidé que je ne pouvais pas être blessé tout de suite. J’ai fait un plan, sachant que j’irais jusqu’au bout. Que je l’épouserais, et que je la quitterais juste après. Quand je suis rentré chez moi, Violaine m’attendait. Elle avait préparé le dîner. Comme si rien ne s’était passé, j’ai parlé. Elle a parlé du catalogue de voyages.
Quand j’ai annoncé que j’avais réservé quelque part, elle a sauté dans mes bras : « Tu te rends compte que, dans deux semaines, nous sommes mariés ? » Elle m’a montré son annulaire, orné d’un joli solitaire de fiançailles. J’étais un mélange de glace et de verre brisé, mais je lui ai souri le plus naturellement du monde. Je n’ai pas dormi pendant quinze jours. J’ai suivi ses déplacements, fouillé ses courriels, découvert une adresse électronique qu’elle avait créée pour Alexis, et compris, d’après leurs échanges, que leur fusion était essentiellement sexuelle. J’ai pris quinze jours de vacances et j’ai quitté le bureau.
J’ai suivi, partout, tout le temps. Elle, lui. À midi, elle retrouvait Alexis. S’il faisait beau, ils allaient au parc. L’un sur l’autre dans l’herbe, sur un banc ou parfois dans la voiture d’Alexis, au fond d’un parking. Les soirs de gym – trois, puis quatre fois par semaine pour « être en forme pour le mariage » – elle allait chez lui. Je les photographiais de loin, autant que je le pouvais, avec le Nikon Reflex que ma belle-mère m’avait offert pour nos fiançailles, sachant que j’étais passionnée d’images.
J’ÉTAIS UN MÉLANGE DE GLACE ET DE VERRE BRISÉ, MAIS JE LUI AI SOURI LE PLUS NATURELLEMENT POSSIBLE…
Le 12 juin, épuisée, flottant dans un brouillard, j’ai dit oui. D’abord devant le maire, puis devant le prêtre. Je plaisantais comme si de rien n’était, attendant le moment de ma sortie. J’ai regardé Violaine avec des yeux amoureux, j’ai tapé dans le dos d’Alexis. A 22h, quand le veau et les légumes furent terminés et que les discours des amis et de la famille furent terminés, je pris le micro.
J’ai vu ma femme frémir à l’idée des compliments que je m’apprêtais à lui faire. J’ai demandé aux 130 invités de regarder sous leur table. J’avais collé sous chacune d’elles une enveloppe contenant des photos de ma femme et d’Alexis s’embrassant. Sur certaines d’entre elles, les plus explicites, on pouvait voir les seins de Violaine. J’ai dit calmement : « Je vous laisse découvrir le contenu de ces enveloppes. Je pars maintenant en voyage.
Je voulais dire à Violaine et Alexis qu’ils étaient les deux personnes que j’aimais le plus au monde. Et pour remercier mes parents, à qui je suis désolé de faire tant de peine en cette seconde… » Puis je suis parti, ma mère à mes trousses. J’ai quand même essayé de la rassurer : « Tout va bien se passer, fais-moi confiance, je t’appellerai, mais laisse-moi partir. »
LE CARNAGE
Des amis m’ont raconté ce qui s’est passé ensuite. Violaine s’est effondrée. Les gens se sont levés pour partir. D’autres ont quand même mangé le dessert ! Alexis s’est enfui. Un carnage… J’avais déjà vu un avocat, qui a contacté Violaine le lendemain. Seul aux Maldives, je n’ai jamais répondu aux appels de celle qui était désormais ma femme. J’ai lu ses messages, ses demandes de pardon, ses explications. Elle était blessée de m’avoir fait du mal mais pas honteuse de ce qu’elle avait fait. Alexis a aussi commencé à écrire. Il m’a beaucoup écrit. Je n’ai répondu à personne. Je me contentais de rassurer ma mère quotidiennement, même si j’avais peur de craquer. Les deux semaines avant le mariage avaient été un trou noir dans lequel je n’avais ni faim, ni froid, ni chaud, ni sommeil.
Et maintenant, je ne me souciais plus du regard des gens dans l’hôtel où j’avais réservé ma lune de miel ! Seul dans mon bungalow sur l’eau, j’ai continué à me comporter comme un robot. De retour à Paris, je n’avais pas envie de retourner à notre appartement. J’ai demandé à mon amie Delphine d’y aller et de rassembler mes affaires.
Elle m’a ensuite hébergé le temps que je trouve un logement à louer. Violaine l’a suppliée de me raisonner. Delphine n’a rien fait, mais elle m’a poussée à aller voir un psy. « Il faut que tu t’effondres, me répétait-elle, il le faut ! ». Je me suis effectivement effondrée à la fin du mois de septembre. Il m’a fallu ces trois mois pour accéder à ma douleur et sortir de l’automatisme.
Je n’ai pas cherché à trouver la sérénité mais surtout à comprendre pourquoi j’avais choisi ce mariage, cet ami…. Pourquoi j’avais construit ce scénario spectaculaire. Aujourd’hui, je suis plutôt fier, pour un garçon bien élevé issu d’une famille bien rangée, d’avoir orchestré ce coup d’éclat. Alexis avait un côté rebelle que je n’ai pas. Maintenant je sais que je peux l’avoir aussi.
A quel prix… Je viens de fêter les deux ans du divorce. Je peux me dire que Violaine et Alexis ont eu une amourette sexuelle et que je n’ai pas pu y faire grand-chose. J’aurais aimé que cela ne m’arrive pas, mais j’ai depuis rencontré quelqu’un. Aussi étrange que cela puisse paraître, je lui fais confiance. Lors de ma dernière séance, j’ai même dit à mon thérapeute que je ne voyais aucun obstacle à me remarier…
source : elle.fr
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